La vie, la liberté et la recherche du bonheur?
Ha lala s’il y a une chose qui a fait beaucoup couler d’encre c’est bien le rêve américain. Ce phénomène qui nous touche tous à une plus grande mesure, les Américains de naissance pour leur espoirs en l’avenir, une certaine positive attitude, et nous immigrés de première génération, dans notre mode de vie de tous les jours mais aussi dans notre foi profonde en demain.
Passant le plus clair de mon temps entre le monde Français et l’univers Américain par mon travail, ma famille, ma culture dirais-je, que n’ais-je entendu à son propos. « Foutaises », « blagues », certains m’affirmant que « les américains eux-mêmes ne croient plus en ce terme, le rêve américain est mort depuis longtemps », la plupart me présentant des analyses et arguments à faire passer notre rêve pour une simple propagande capitaliste. Mais qu’en est-il réellement ? Ce rêve est-il mort, a t-il aussi même vraiment existé ? Pour y voir un peu plus clair, il est nécessaire de chercher l’origine même de ce « rêve américain ».
Car n’en déplaise à certains, le rêve américain n’est pas qu’une invention capitaliste visant à attirer des personnes, à les bercer de douces illusions ! Et non, cet American Dream est présent aux bases mêmes de la nation américaine, aux sources de cette dernière, présent dans le projet initial des pères fondateurs.
« Comment est-ce possible ? ». Mais oui rappelez vous un des textes original, le Bill of Right, notre « droit de l’homme et du citoyen », qui soit dit en passant est antérieur à votre version mais bon ceci est autre histoire. Le préambule de notre contrat social en quelques sortes commence ainsi :
“We hold these truths to be self-evident, that all men are created equal, that they are endowed by their Creator with certain unalienable Rights, that among these are Life, Liberty and the pursuit of Happiness.”
En version Française cela donne ceci:
« Nous tenons pour évidentes pour elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. »
L’important dans ce texte est qu’il diffère profondément de votre « Droits de l’homme et du citoyen » sur un principe qui est pour nous fondamental. Si nous sommes d’accord sur la vie et la liberté, le texte américain ajoute une notion qui est propre à notre culture : La recherche du bonheur, ça y est la graine qui fera germé la notion de rêve américain était plantée. Pour comprendre un tel concept il faut prendre en compte l’esprit des pères fondateurs même. Contrairement à ce que beaucoup d’européens pensent, Français en premier, nos pères fondateurs, les Thomas Paine, Benjamin Franklin, qui se réunissaient à l’automne 1776 pour se mettre d’accord sur une constitution, étaient profondément encrés dans les attentes de leurs époques mais aussi ceux de l’avenir. Ils avaient vécu les répressions de l’Europe, l’intolérance religieuse, mais ils étaient surtout au courant de l’histoire houleuse de l’intolérance des pays européens jusqu'à leur époque. Les pères fondateurs étaient pour la plupart de grands érudits, de formidables esprits pour leur époque. Ils savaient bien que leur continent n’était pas simplement un rêve d’or et d’argent mais bien plus, en commençant par Thomas Paine, débarqué en 1774 sans un sou en Nouvelle Angleterre, était riche de cette possibilité de pouvoir rechercher son bonheur. Car il s’agit avant tout d’une possibilité, de pouvoir tout recommencer à zéro, c’est là la base même du rêve américain. Le caractère monétaire ou du moins du niveau de vie ne s’appliqua qu’à partir de la fin de la seconde guerre mondiale où les américains avaient un niveau de vie deux fois supérieur à l’Europe en reconstruction et à ses immigrants.
Si une certaine facilité de notre système rend ce rêve possible, il n’explique pas complètement sa propagation à si grande échelle comme aujourd’hui. Cette expansion ou plutôt diffusion comme j’aime souvent le rappeler, vient du caractère même de notre pays. Les USA ont toujours été une terre métisse dès le départ, une terre d’accueil, où les immigrations de différentes cultures et horizons ne cessaient de se succéder. Car avant tout le rêve américain est destiné à tous le monde, il est générale mais aussi tellement personnel car chacun à sa propre vision du bonheur. Cela peut être matériel, religieux ou autres. Les générations se succèdent, les cultures se mélangent, et tous s’approprient ce concept, c’est cela qui fait sa force.
La recherche du bonheur est un principe clé pour nous. Maintes fois au cours de notre histoire, il nous fut rappelé. Il nous fut rappelé au cours des années 30 par Franklin Roosevelt lors de la grande crise, où de nombreux américains étant au chômage se voyaient privés de leurs quêtes du bonheur. A chaque contestation sociale, les minorités, les contestataires clament à leur tour non pas une fin du système comme en Europe sous mai 68 mais mettent au grand jour leur exclusion de ce rêve américain, cette impossibilité de pouvoir rechercher le bonheur. Cela fût le cas notamment des noirs dans le années 60.
Les noirs justement me direz-vous, parlons des exclus car comme j’entends souvent en hexagone, « Le rêve américain est bien beau, mais il ne parle pas des exclus, des millions de pauvres.. ». Et des exclus il est vrai qu’il y en a eu, mais je pense qu’il est nécessaire de revenir une fois de plus aux pères fondateurs pour expliquer une partie des ces exclus. Car dés la signature de la constitution il y eu des exclus, car être un homme libre signifiait à l‘époque être blanc et propriétaire, soit riche. Pour ceux qui se réjouissent de cette mentalité américaine je leur rétorquerais que cet état d’esprit régnait tout aussi bien en Europe et notamment en Angleterre où être blanc et propriétaire était une condition majeure pour avoir le droit de vote au parlement. Alors bien sûr cela n’excuse en rien l’exclusion qui en résultait mais tous grands esprits que les pères fondateurs étaient, ils n’en étaient pas moins des hommes de leur temps, empreint de leur préjugés, de leur convictions, de leur maux aussi.
Etaient exclus dès le commencement, les pauvres, les femmes, les Indiens et les esclaves noirs. Mais si l’Amérique était entachée par ses exclusions, son histoire allait une fois de plus prouver l’attachement fondamental et sans équivoque de son peuple à ses valeurs, à son projet de constitution. Car à chaque fois les exclus n’ont demandé qu’une seule chose: que l’Amérique soit fidèle à ses principes et qu’elle respecte son projet initial ! Ces exclus ont par leur contestations exigé d’avoir le droit à la vie, à la liberté et surtout le droit à la recherche du bonheur. Ce fut le cas des pauvres qui eurent le droit de vote, des noirs en 1868, des femmes en 1920 et puis pour finir des Indiens en 1924. Alors certes ce ne fût peut-être pas effectif de suite, ni même entré dans les mœurs et les consciences collectives des différentes époques mais le temps n’est point venu à bout de cette constitution, les générations ont inventés des amendements, ses textes à ajouter au projet initial présentant les évolutions des mœurs de la culture américaine, permettant notamment d’élargir le rêve américain aux catégories de la population qui en étaient exclues. Bref il sera de moins en moins possible d’être exclus sur le sol de Jefferson. Certes me direz-vous aujourd’hui ce rêve est -l toujours réalisable ? Pourquoi tant de pauvres, d’exclus en Amérique ?
Déjà il est important de noter un point crucial sur l’Amérique, c’est que le projet des pères fondateurs, et les institutions mêmes des USA, s’ils ont pour but de protéger et de faire prospérer le peuple américain, n’ont en rien l’objet de protéger le peuple contre la pauvreté. En effet, le principal but des immigrants fraîchement débarqués d’Europe au cours des siècles était bien moins de recevoir des aides de l’état que de pouvoir partir à la conquête de leur propre rêve par leurs propres moyens et l’Etat était plus que tolérant de leur permettre de réaliser leur entreprise. Les nombreuses générations successives d’immigrants arrivant aux USA étaient bien peu réceptives à trouver un gouvernement fort, eux qui fuyaient justement à cause de problèmes d’intolérance et de pauvreté. Le capitalisme et individualisme à l‘américaine leur convenaient. Alors bien sur les différentes crises que subirent les USA diminua de plus en plus ce capitalisme sauvage mais le coté individualiste resta pour toujours. Ca y est j’entends déjà certain dire « Egoïste », « Je vous l’avais bien dit, c’est le chacun pour soi ». En fait c’est un peu plus compliqué que cela. L’individualisme à l’américaine ne signifie pas tant une volonté à écraser son prochain qu’elle réside dans la définition de la liberté outre-atlantique. Pour résumer cette pensée, l’un des pères fondateurs, Alexander Hamilton disait ceci :
« L’inégalité existera aussi longtemps que la liberté. Elle est le résultat de cette liberté même ».
Ce principe va pratiquement à l’encontre du modèle républicain français. Celui où l’individu est pris en tant que tel, sans distinction de sexe, d’âge et de religion, la liberté d’être libres et égaux devant la loi. Aux USA, nous reconnaissons les individus comme égaux mais la liberté se réalise dans la réalisation de notre mode de vie, de nos valeurs. Nous sommes libres car nous sommes nous même, nous sommes libre de notre différence par rapport à l’autre mais unis par le projet de notre constitution. Il n’y a pas réellement de modèle car celui-ci dépend de chaque individu, il y a de nombreux modèles. Alors bien sûr me direz-vous cela n’excuse pas la pauvreté, mais aucune démocratie, aucun système à l’heure actuelle ne s’est démontré parfait et l’Amérique ne s’est jamais targuée de vouloir être un modèle de ce type. Bien sur elle peut se targuer d’être un modèle de richesse, de stabilité politique, d’immigration, et il faut avouer que si elle n’est pas parfaite, elle est parvenue à tenir une grande partie de ses prétentions. D’ailleurs les pères fondateurs eux-même ne recherchaient pas la perfection, contrairement à d’autres idéologies qui pensaient atteindre se résultat mais qui ont seulement sombré à leur tour dans l’oubli du temps.
Le discours de Benjamin Franklin lors du vote de la constitution va dans ce sens :
« J’avoue qu’il y a dans cette constitution plusieurs points que je n’approuve pas à l’heure actuelle (…) Mais j’ai vécu une longue vie, et j’ai fait plusieurs fois l’expérience qu’après plus amples informations, ou une considération plus approfondie, je me suis trouvé obligé de changer d’opinion même sur de sujets importants (…) J’accepte cette constitution avec tous ses défauts, s’il y en a (…) Je doute qu’une autre convention puisse en produire une meilleure. Quand vous assemblez un groupe d’hommes pour bénéficier de leur sagesse, vous assemblez aussi inévitablement tous leurs préjugés, leurs passions, leurs opinions erronés, leurs intérêts locaux, et leur points de vue égoïstes. D’une telle assemblée, peut-on attendre un résultat parfait ? Je suis donc très étonné (…) de constater que ce système est si proche de la perfection(…). Je consens à cette constitution, parce que je n’en attends pas de meilleure, et que je ne suis pas sûr que ce ne soit pas la meilleure. Mes opinions sur ses défauts, je les sacrifie au bien commun. »
Alors pour tous cela je conclurai par une affirmation positive que le rêve américain est encore possible, encore faut-il définir son propre rêve. Sa persistance de nos jours vient du caractère universel de se sentir libre et en sécurité, de ne pas avoir peur de pratiquer sa religion. De mener une vie normale, certes non parfaite mais de pouvoir offrir à sa femme et ses enfants ce dont ils ont besoin. Le rêve américain persiste encore de nos jours et s’est étendu avec les siècles car contrairement à des idéologies, ce dernier s’adresse à Monsieur tout le monde mais aussi et surtout aux exclus, aux pauvres, aux minorités du monde entier, il est tourné vers l’extérieur et non simplement vers les habitants des USA, c’est cela le rêve américain, que quelque-part sur notre plantète, un continent donne non pas une assurance de richesses mais une possibilité de vivre sa vie comme on l’entend, sans aucune entrave à ce qui est de plus cher pour son peuple, la liberté.
Sheppard
07/02/09